Si tu laisses ton chien
Te mener à sa guise autour de mon village,
Ou bien si le Destin
Te donne rendez-vous pour d’heureux lendemains,
Alors cours, passe ton chemin…
Mais si, comme Epicure,
Tu recherches les dons que t’offre la Nature,
Alors pousse la grille,
Entre dans mon jardin,
Viens !!!
Laisse le gazon frais caresser tes pieds nus du moelleux de sa mousse,
Ecoute !
Le grand cèdre te parlera du Liban en danger
Et le liquidambar, flamboyant à l’automne,
Te contera l’été indien,
Dans les forêts huronnes
Du pays canadien.
Tu seras attiré
Par la suave odeur du magnolia poudré,
Puis tu seras surpris, devant l’arum ivoire,
De voir que la rosée
Goutte au creux de sa coupe pour le désaltérer.
Et si des lis de la Madone, attaqués par le criocère,
Tu fais un beau bouquet,
Ce sera pour les protéger!
Plus loin, les pivoines joufflues
Exhaleront pour toi leur doux parfum sucré.
Si tu viens au printemps,
À l’heure où les fruitiers
Préparent en secret les bons fruits de l’été,
Laisse les deux pommiers
Pleurer leurs blancs pétales
Sur tes souliers.
Peut-être ce sera l’époque où la froidure,
Délaissant nos régions, permettra la culture.
Alors pour toi je cueillerai
La tomate rougie ou bien la gariguette,
Un bouquet de thym frais
Ou la laitue pommée.
Et si tu viens plutôt à la fin de l’été,
Ce sera de brugnons ou de prunes violettes
Que je remplirai ton panier,
Et tu pourras chercher
Dans la forêt de mes dahlias
Tes préférés.
Mais d’avril à décembre, toujours, dans mon jardin,
De beaux rosiers t’attendent au détour du chemin :
Leurs fleurs épanouies raviront ton regard
Et leur parfum profond élèvera ton âme
Jusqu’aux cieux.
Enfin, quand, enivré par toutes ces merveilles,
Tu reprendras ton chemin,
N’oublie pas de saluer le céanothe bleu, gloire de mon jardin,
Qui, chaque mois de mai,
Attire le regard des passants étonnés
De voir un océan lentement s’égoutter
Si près de ma maison…
Les quatre saisons de mes oiseaux.